« Toc Toc » : Quand le Divan S’invite sur Scène

La pièce « Toc Toc » du dramaturge français Laurent Baffie est devenue un phénomène théâtral, non seulement pour ses dialogues percutants et son humour décapant, mais aussi pour sa capacité à aborder un sujet sensible avec une humanité surprenante. En réunissant dans la salle d’attente d’un psychiatre de renom une brochette de personnages hauts en couleur, tous atteints de Troubles Obsessionnels Compulsifs (TOC), la pièce réussit le pari de faire rire d’une souffrance bien réelle, sans jamais s’en moquer.

Mais au-delà du rire, « Toc Toc » ouvre une fenêtre sur la complexité de ces troubles. Et si, en sortant du théâtre, on s’interrogeait sur les solutions ? Parmi les approches thérapeutiques qui gagnent en reconnaissance pour la gestion de l’anxiété liée aux TOC, l’hypnothérapie offre des pistes intéressantes.

« Toc Toc » : Le Rire comme Thérapie de Groupe Inattendue

Le postulat de « Toc Toc » est simple : six patients attendent le célèbre Dr Stern, un spécialiste des TOC. L’ennui, c’est que le médecin est en retard. Très en retard.

Nous rencontrons alors :

  • Fred, atteint du syndrome de Gilles de la Tourette, qui ne peut s’empêcher de jurer (coprolalie).
  • Vincent, un arithmomane qui compte absolument tout.
  • Blanche, une nosophobe terrorisée par les microbes, qui se lave les mains compulsivement.
  • Marie, qui souffre de palilalie et vérifie sans cesse si elle a bien fermé sa porte ou ses clés.
  • Lili, qui répète chaque phrase deux fois (écholalie/palilalie).
  • Bob, obsédé par la symétrie et incapable de marcher sur les lignes.

Contraints d’attendre ensemble, ces personnages vont, à leur manière, créer une thérapie de groupe improvisée. La pièce de Baffie est brillante en ce qu’elle montre que derrière le symptôme (le « Toc »), il y a une personne qui souffre, et que la première étape de la guérison est peut-être la dédramatisation et la solidarité.

Au-delà de la Scène : Comprendre le Mécanisme du TOC

Ce que la pièce illustre avec humour, c’est le cycle infernal du TOC. Un TOC est un trouble anxieux qui se caractérise par deux composantes :

  1. Les Obsessions : Des pensées, des images ou des impulsions intrusives et indésirables qui génèrent une anxiété intense (par exemple, la peur des microbes pour Blanche, ou le doute pathologique pour Marie).
  2. Les Compulsions : Des comportements répétitifs ou des actes mentaux (les « Tocs ») que la personne se sent obligée d’accomplir pour neutraliser l’obsession et réduire l’anxiété (se laver les mains, compter, vérifier, ranger).

Le soulagement est temporaire. Le TOC est un cercle vicieux : la compulsion renforce l’obsession à long terme, car le cerveau apprend que seul ce rituel peut apaiser l’angoisse.

L’Hypnothérapie : Reprogrammer le Disque Dur de l’Anxiété

Si le Dr Stern n’arrive jamais dans la pièce, dans la vie réelle, des solutions existent. Les Thérapies Comportementales et Cognitives (TCC), notamment l’Exposition avec Prévention de la Réponse (EPR), sont la référence. L’hypnothérapie, souvent utilisée en complément, peut s’avérer un outil puissant pour aider les personnes souffrant de TOC.

Voici comment l’hypnothérapie peut intervenir :

1. Casser le Lien Anxiété-Compulsion

L’hypnose est, avant tout, un état de relaxation profonde et de concentration focalisée. Pour une personne atteinte de TOC, dont le niveau d’anxiété de base est souvent très élevé, l’hypnose permet d’abord d’abaisser le niveau de stress général. En état d’hypnose, le thérapeute peut aider le patient à dissocier l’obsession (la pensée « cette poignée est sale ») de la réponse émotionnelle (la panique). L’objectif est de permettre au patient de ressentir l’obsession sans que celle-ci ne déclenche l’alarme de l’anxiété qui mène à la compulsion.

2. Modifier les Associations Inconscientes

Les TOC sont des automatismes profondément ancrés dans l’inconscient. L’hypnothérapie travaille directement avec cette partie de l’esprit. En utilisant des suggestions et des métaphores, l’hypnothérapeute peut aider le patient à « reprogrammer » sa réponse.

  • Pour Blanche (peur des microbes) : On pourrait travailler sur la perception de son système immunitaire, le visualisant comme une armée puissante et compétente, réduisant ainsi le besoin de « protection » externe (le lavage).
  • Pour Vincent (arithmomanie) : Le travail pourrait se concentrer sur le fait de trouver un « point de complétude » interne, de ressentir que les choses sont « justes » sans avoir besoin de la validation d’un chiffre.

3. L’Exposition en Imagination (EPR hypnotique)

L’hypnose est un outil formidable pour la visualisation. Le thérapeute peut guider le patient à s’exposer « en imagination » à la situation redoutée, tout en restant dans un état de calme.

  • Pour Marie (vérification) : Elle pourrait se visualiser en train de quitter sa maison, de fermer la porte une seule fois, et de ressentir l’anxiété monter… puis redescendre sans qu’elle ne retourne vérifier. En vivant cela en état hypnotique, elle « prouve » à son cerveau qu’elle peut survivre à l’inconfort, ce qui désamorce le besoin de compulsion.

4. Renforcer le « Moi » et la Confiance

Enfin, l’hypnose est très efficace pour renforcer l’estime de soi et le sentiment de contrôle. Pour une personne dont la vie est dictée par ses TOC, reprendre le pouvoir est essentiel. L’hypnothérapeute aide le patient à se reconnecter à ses propres ressources, à sa capacité de choisir sa réponse plutôt que de la subir.

Conclusion

« Toc Toc » nous fait rire aux larmes, mais nous rappelle surtout que les troubles anxieux sont un fardeau. Si la solidarité montrée dans la pièce est un baume, elle ne remplace pas une prise en charge adaptée. L’hypnothérapie, en permettant de dialoguer avec l’inconscient et de désamorcer les mécanismes de l’anxiété à leur source, offre une voie complémentaire et efficace pour aider les « Blanche », « Vincent » et « Fred » du monde réel à retrouver leur liberté de penser et d’agir.

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